Qui assiste aux réceptions de
l’Hôtel de Ville de Dunkerque ne peut manquer Yolande. Son portrait
trône derrière le pupitre où sont prononcés les discours… Curieux
destin d’une comtesse qui fut tout sauf faible femme
Une vie avant la FlandreNée le 15 septembre 1326 au château d’Alluy (en Bourgogne), elle est
seule héritière de Robert de Flandre et de Jeanne de Bretagne. Par son
père, elle possède entre autres, les terres entre Cassel, Dunkerque et
Gravelines. Le reste de son héritage fait d’elle un «beau parti».
D’abord fiancée au futur comte de Flandre Louis de Mâle, elle est
promise à 11 ans au jeune comte Henri IV de Bar, mariée en 1340, veuve
quatre ans plus tard, elle doit exercer la régence pour son fils,
immédiatement contestée par sa belle-famille mais aussi par la noblesse
et les villes du Barrois.
Bien qu’aidée par le Roi de France, la tâche est ardue car ses
terres sont riches. Belle-sœur du roi de France Jean II par son
remariage avec Philippe de Navarre, elle tient farouchement à son
pouvoir et fait tout pour ne pas être reléguée à la cour. Son obsession
pour le maintien de ses droits n’empêche pourtant pas son éviction par
son fils de 16 ans en 1359.
Sa régence prend alors fin brutalement pour se consacrer à son
douaire, lui octroyant son indépendance financière et où elle se
comporte en princesse souveraine jalouse de ses prérogatives. Partout,
elle défend ses terres dans le Barrois, en Normandie mais aussi en
Flandre. Elle fait aussi frapper de la fausse monnaie pour régler ses
problèmes financiers. Découverte, rebelle, elle est excommuniée et ne
reçoit l’absolution du pape qu’en 1362. De partout tombent de terribles
accusations quant à ses exactions et sa cruauté, l’obligeant sans cesse
à faire pénitence et de manifester sa piété. Accusée d’être complice du
Comte de Flandre allié aux Anglais, le roi de France la fait
emprisonner en 1371, elle s’évade l’année suivante. Arrêtée en Flandre,
elle est amenée à la Prison du Temple à Paris. Libérée sous conditions
en 1373, elle ne sauve finalement que ses biens flamands…
La Dame de CasselIndésirable, elle se retire en sa résidence du Bois de Nieppe où
elle se débat dans les procédures pour contrer le Comte de Flandre qui
grignote ses biens et surtout qui remet son autorité en cause. C’est
que le Comte Louis de Mâle installe en Flandre de nouvelles
administrations qui centralisent et rationnalisent le pouvoir comtal,
laissant de moins en moins de pouvoirs à ses vassaux… Ce que ne peut
souffrir Yolande dont les privilèges se réduisent d’autant. A cela
s’ajoutent les révoltes des Flamands qui supportent de moins en moins
l’autorité que la crise économique est profonde. Le soulèvement gagne
même Dunkerque… et dure jusque 1382, quand les révoltés sont écrasés à
Roosebecke par le Duc de Bourgogne.
L’année suivante, les combats reprennent d’abord sur ses terres
mais la révolte est éphémère. La Bourgogne tient ses vassaux d’une main
de fer… Quand elle refuse de céder aux injonctions de livrer les
dénombrements, les déclarations fiscales détaillées, de ses fiefs, elle
voit les commises, c’est à dire les confiscations, se multiplier.
Jalouse de ses pouvoirs, elle doit les contester sans cesse.
Finalement, elle ne peut que céder devant un état fort et déjà moderne…
La Bourgogne la contraint à rentrer dans le rang, parfois de façon
humiliante mais nécessaire jusqu’à sa mort en 1395… Dunkerque et Cassel
perdent une maîtresse femme qui leur avait donné des libertés et des
franchises, fait reconstruire le château de son père… Quant aux
artistes, ils pleurent un mécène averti…