Vendredi
dernier, l’audience solennelle du Tribunal de Grande Instance (TGI) m’a
laissé sur ma faim dans la mesure où j’y ai entendu des propos fort
rassurants et, j’en conviens, agréables à entendre alors que dans le
même temps mes différents contacts avec la population me prouvent que
l’insécurité est une préoccupation pour de nombreux Dunkerquois. Si
les propos rassurants entendus au TGI font état de la baisse des faits
constatés, de la mise en œuvre du principe de tolérance zéro et de la
réduction du délai entre l’infraction et la sanction, les Dunkerquois
ressentent tout autre chose.
Lors de mes rencontres, je pose
souvent la question suivante : “Quels sont à vos yeux les trois
principaux points à améliorer à Dunkerque ?” Et la sécurité est très
souvent citée dans la réponse, au même titre que la propreté. Visitant
des commerçants en centre-ville vendredi matin avant de me rendre à
l’audience, j’ai recueilli le témoignage poignant d’une jeune femme
m’expliquant combien ses conditions de travail étaient difficiles.
Régulièrement confrontée à l’irruption de bandes de 4 ou 5 individus
dans sa boutique, elle doit surveiller leurs agissements et tenter de
les dissuader de passer à l’acte avant qu’ils ne fassent main basse sur
la marchandise qui les intéresse et ne détalent aussi sec.
Régulièrement insultée et bousculée, elle a cessé depuis longtemps de
porter plainte : “puisque si la police les coince, de toute façon ils
ressortiront dans la foulée”…
Et on touche ici, avec ce
témoignage d’impuissance et de fatalisme, “car, voyez-vous M. Eymery,
il faut bien travailler”, à l’un des vrais scandales de la France
d’aujourd’hui. Et le procureur de la République, qui avait avec sagesse
introduit ses propos en relativisant l’adéquation de la statistique à
la réalité, doit bien savoir que de nombreux actes dits par antiphrase
de “petite délinquance” ne sont pas connus des forces de police à
cause, précisément, de ce fatalisme des victimes.
Or cette
absence de dépôt de plainte – également due, parfois, à la peur des
représailles – et qui alimente la diminution statistique de la
délinquance a souvent un effet pervers, celui de justifier la
diminution des effectifs dédiés à la sécurité publique. Ce qui, au bout
du compte, fait le jeu des voyous…